Sucy, points d’histoire
Lettre mensuelle de la Société Historique et Archéologique de Sucy-en-Brie (shas.fr)
LA MAISON DU TRIPOT
Avant tout, il convient de préciser que sous l’Ancien Régime, le nom « tripot » ne désignait pas comme aujourd’hui un lieu mal famé, mais un perron dallé de pierres, couvert d’un toit en charpente. C’est la description exacte du perron qui donne accès à la maison.
Situé sous la halle dont on ne peut la dissocier, la maison du Tripot existe toujours et correspond au bâtiment portant les numéros 1, 1bis et 1ter de la rue de Brévannes, bien que ce bâtiment ait été plusieurs fois modifié.
Dans ce local, les officiers du Chapitre conservaient les boisseaux en bois cerclés de fer et étalonnés, dont ils se servaient pour mesurer les grains proposés au marché et en fixer le prix. Comme les grains, les œufs et le beurre étaient contrôlés avant de passer sous la halle.
C’est aussi au tripot que les boulangers devaient faire contrôler leurs balances. Ils étaient particulièrement surveillés par les officiers du Chapitre qui prétendaient qu’il n’était pas exagéré de dire que les registres d’audience contenaient plus de 200 ordonnances pour avoir vendu à faux poids.
Périodiquement, un boulanger était requis pour transformer en pain un boisseau de farine, en présence d’un juge du procureur fiscal, et ce afin d’établir des règlements.
C’est aussi au tripot que la Fabrique (assemblée de laïcs chargés de gérer les biens temporels de l’église) faisait peser la farine destinée à la confection du pain bénit, distribué aux messes des jours de fête.
Les boulangers qui vendaient à faux poids voyaient leur pain saisi et devaient s’acquitter d’une amende, dont la moitié était attribuée à la Maison de Charité.
En 1691, les officiers du Chapitre remettent à Jean-Baptiste Brossard, geôlier chargé de nourrir les prisonniers, deux boisseaux cerclés de fer, conformes aux anciens.
La cour du tripot s’ouvrait sur la rue du même nom (aujourd’hui rue de Brévannes). Cette cour qui desservait également la Prévôté, est toujours ornée d’un puits, blotti contre un petit perron de pierre, couvert d’un toit en encorbellement. Un autre puits, appelé « le puits du tripot » est encore visible, avec son anse en pierre au ras du trottoir, sous le numéro 3 de la rue de Brévannes.
Juste au-dessous du tripot, les coteaux du Petit-Val s’étalaient, couverts de vignes, et la maison se dressait, plantée au milieu des ceps, en haut de deux petites parcelles : le clos du tripot et le clos du Chapitre. Les revenus de la propriété étaient affectés à l’entretien des enfants de chœur de Notre-Dame de Paris, depuis 1587. A ces revenus s’ajoutaient des legs et des dons de biens immobiliers, sans oublier le bois des hêtres.
Le tripot était donc un bureau parmi les autres, dans ce centre administratif où s’opéraient les démarches et les transactions qui soumettaient les villageois à leur seigneur, le Chapitre de Notre-Dame de Paris. Sans munificence aucune, l’ensemble hétéroclite de la maison seigneuriale imposait néanmoins, au centre du village, l’image de la puissance seigneuriale.
En raison des opérations et des démarches opérées en ses lieux, le tripot apparaît bien être le bureau de contrôle des poids et mesures, un service administratif hébergé comme les autres dans la maison du Chapitre, dont il occupe avec la halle toute l’aile nord. Les activités nombreuses et variées qui s’y déroulaient, contribuaient à faire de la maison seigneuriale le pôle d’attraction au carrefour avec la rue principale, la rue du Moutier.
Texte préparé par Françoise Balard